Qui sont les principaux émetteurs ?

Par Hugo Le Boulzec



Le terme de « justice climatique » est apparu durant les négociations des COP. En effet, les pays en développement considèrent que le dérèglement climatique constitue une responsabilité historique des pays développés pour leurs émissions passées, et demandent donc à ce titre des compensations. L’engagement des principaux émetteurs constituera ainsi un enjeu crucial des négociations de Paris. Étudions donc la répartition des émissions de CO2 sur la période 1973-2012.



Une domination de l’OCDE


L’Organisation de Coopération et de Développement Économiques fut créée en 1961 et regroupe 34 États. Il s’agit d’une grande partie d’États européens, des États nord-américains et de quelques États d’Asie, d’Océanie et du Proche-Orient. Elle représente donc les principaux pays développés des années 1970 (et encore une majorité aujourd’hui).


Pour une population avoisinant 24% du globe en 1973, ses émissions représentaient 66% du total (voir graphique 1[1]). La seconde forte proportion (Non-OCDE Europe et Eurasie) prend en compte l’URSS, alors dans une période de fort développement. À ce moment de l’histoire, l’OCDE représentait plus de 80% du PIB mondial.

La période allant de 1973 au début des années 2000 n’a pas marqué de changement majeur, l’OCDE représentant toujours plus de la moitié (53%) des émissions (graphique 2). On note toutefois une émergence de l’Asie et de la Chine, ainsi qu’un quadruplement des émissions du Moyen-Orient. Cela est dû à la surproduction pétrolière caractérisant cette période (après le contre-choc pétrolier et les accords entre l’Arabie Saoudite et les États-Unis), la responsabilité de la consommation ne repose donc que très peu sur le Moyen-Orient.


Un développement effréné des pays hors-OCDE


Le début des années 2000 marque un tournant. On assiste à une accélération de la croissance des principaux pays émergents et à un ralentissement de celle des pays de l’OCDE. Cet inversement des rôles se traduit par une augmentation conséquente de la part des pays hors-OCDE dans les émissions de CO2, surtout en Asie. Les émissions des pays de l’OCDE ont ainsi été doublées par  celles des pays hors-OCDE en 2004, et par celles des 6 principaux pays hors-OCDE[1] en 2011 (graphique 3[2]).

           On observe ainsi un recul des pays membres de l’OCDE dans les émissions mondiales (graphique 4). Cette évolution est à mettre en perspective avec le fait que l’OCDE regroupe des pays aux économies matures, et relativement « modernes » au niveau énergétique. De même, tandis que de plus en plus de pays de membres de l’OCDE développent les énergies renouvelables (et importent les énergies fossiles de l’étranger, notamment hors-OCDE), une partie des puissances émergentes a recours au charbon. La question démographique joue aussi un rôle prépondérant. Sur la période 2000/2012, la population des pays de l’OCDE a augmenté de 8,7% tandis que celle des pays hors-OCDE a bondi de 17,6% [1], et la taille des populations influe fortement sur les émissions (voir graphique 5).


                L’évolution des émissions des pays hors-OCDE traduit aussi une réalité économique de la mondialisation. Certains de ces pays concentrent les usines des firmes occidentales ou la production d’énergie fossile, et donc les émissions des biens consommés dans les pays industrialisés. Ces statistiques souffrent donc d’un inconvénient : elles ne considèrent pas les émissions consommées sur le territoire national.


                Enfin, il semble important de rappeler l’importance des émissions de la Chine et des États-Unis, deux premières puissances mondiales, qui représentaient 42% des émissions mondiales de CO2 en 2012. Un accord bilatéral est donc crucial pour l’objectif de limitation du réchauffement à 2°C.



Notes  :

[1] La catégorie « Bunkers » comprend la marine et l’aviation internationale.

[2] Les 6 principaux pays hors-OCDE sont le Brésil, la Russie, l’Inde, l’Indonésie, la Chine et l’Afrique du Sud (BRIICS).

[3] Le bond d’émissions sur le graphique 3 s’explique par l’absence de données sur les émissions de l’URSS.

[4] Chiffres Banque Mondiale sur la période 2000/2012.

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